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Le sidepull : une alternative au filet traditionnel pour monter sans mors

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Le sidepull est un type de bridon sans mors qui permet de contrôler son cheval sans exercer de pression directe sur sa bouche. Souvent perçu comme plus doux et respectueux, il offre une alternative intéressante aux filets classiques. À travers cet article, je souhaite partager mon expérience personnelle : comment je suis passée du mors au sans mors, ce que cette transition a changé dans ma relation avec ma jument, et pourquoi le sidepull mérite d’être mieux connu aujourd’hui. Mais avant d’en venir à mon parcours, il est intéressant de revenir sur l’histoire du mors, pour comprendre pourquoi cet outil est resté si présent dans nos pratiques équestres.

Historique rapide du mors

Le mors accompagne l’histoire de l’équitation depuis des millénaires. Les premiers modèles, fabriqués en os, cuir, corde ou bois, apparaissent dès la fin du Néolithique. Fragiles et vite usés, ils sont remplacés à l’âge du Bronze et du Fer par des mors métalliques : ceux découverts en Loristan (Iran actuel) ressemblent déjà, dans leur principe, à ceux d’aujourd’hui. Leur rôle reste alors très utilitaire : contrôler la vitesse et la direction de chevaux montés ou attelés, notamment à la guerre.

L’Antiquité marque un premier tournant avec Xénophon (Ve s. av. J.-C.), historien, philosophe, disciple de Socrate et théoricien de l’équitation. Ce dernier prône une équitation fondée sur la légèreté et la confiance. Mais cette approche reste minoritaire : la plupart des civilisations antiques et romaines privilégient avant tout la force et le contrôle, avec des mors souvent durs.

Au Moyen Âge, l’essor de la cavalerie lourde renforce encore cette logique. Les chevaux, plus grands et puissants, portent les chevaliers en armure : pour les maîtriser, on forge des mors à longues branches et à forts leviers, parfois très sévères.

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Image by Peter Woelfel from Pixabay

La Renaissance et l’époque classique voient cependant une évolution majeure. À Naples, des maîtres équestres développent une équitation de prestige avec airs de haute école, mais recourent à des mors très contraignants. Au XVIIe et XVIIIe siècle, des écuyers français comme Pluvinel ou La Guérinière réhabilitent une équitation plus douce et respectueuse, renouant avec les principes de Xénophon.

Pourtant, aujourd’hui encore, beaucoup de chevaux sont équipés de mors trop durs, trop serrés ou mal adaptés. Bien souvent, le mors est utilisé comme une solution rapide face à un problème de communication : on serre une muserolle pour empêcher le cheval d’ouvrir la bouche, on change de mors en pensant corriger un comportement… alors que le véritable travail reste celui de la relation, de la patience et de l’éducation.

Si le mors est encore si largement répandu, c’est donc surtout par tradition, habitude et manque d’information. Mais comme l’histoire nous le rappelle : ce n’est pas l’outil qui fait l’équitation, c’est le lien entre le cheval et son cavalier.

Mon expérience : passer du Pelham au sidepull

Quand j’ai rencontré ma jument, elle était encore au club et montée par des cavaliers débutants. Comme elle avait tendance à « embarquer » ses jeunes cavaliers, on lui avait mis un Pelham pour la « canaliser ». Avec le recul, je sais que ce choix était contre-productif : plus on durcissait, plus elle s’appuyait dessus. Mais à l’époque, je n’avais pas les connaissances pour remettre en question ce matériel, et surtout, ce n’était pas moi qui décidais.

Quand j’ai eu la chance de la récupérer après son éparvin, en 2010, les choses ont changé. La première chose que j’ai faite, c’est de troquer le Pelham contre un simple mors. Et là, surprise : la jument « qui tirait tout le temps » ne tirait plus du tout. Comme quoi, ce n’était pas elle le problème.

Photo de Kéopse et moi

J’ai ensuite tâtonné : mors simple brisure, double brisure, essais de tailles différentes… Chaque ajustement apportait un peu plus de confort, mais rien ne me satisfaisait totalement. Les mors adaptés à sa bouche étaient rares, coûteux, et je n’avais pas les moyens d’investir des centaines d’euros dedans.

C’est à ce moment-là que je suis tombée sur un tutoriel expliquant comment transformer un ancien filet en sidepull. J’ai tenté l’expérience, un peu au hasard, curieuse de voir comment ma jument réagirait. Et là, révélation : aucune phase de confusion, aucune résistance. Elle a tout de suite compris mes demandes, que ce soit en carrière ou en balade. Comme si elle avait attendu ça depuis toujours.

Le seul hic de ce premier essai maison, c’est que la muserolle était trop fine et pas assez stable : elle avait tendance à tourner si j’avais une action de main un peu trop forte (notamment quand il fallait convaincre madame d’arrêter de brouter en balade 🫠). Du coup, j’ai continué de monter sans mors, mais simplement en attachant mes rênes à mon licol : une solution plus stable que le bricolage, mais moins que les sidepulls actuels.

J’ai fonctionné ainsi pendant plusieurs années, jusqu’au jour où j’ai investi dans de « vrais » sidepulls du commerce. J’en possède aujourd’hui deux : un modèle western de MD Equestrian et celui de chez Decathlon, que je trouve d’ailleurs hyper bien pensé et très stable. Mais malgré ces équipements plus confortables et pratiques, je garde une affection particulière pour mon bricolage d’époque. Il a marqué un vrai tournant dans ma relation avec ma jument : une communication plus douce, plus fluide, plus juste.

Cette expérience m’a convaincue qu’il existait des alternatives plus respectueuses et efficaces que le mors. Mais alors, pourquoi avoir choisi le sidepull plutôt qu’un autre système sans mors ?

Pourquoi choisir le sidepull ?

Quand on se tourne vers une équitation sans mors, on se rend vite compte qu’il existe de nombreuses alternatives : le licol éthologique, le hackamore, le bitless bridle… Alors pourquoi ai-je choisi le sidepull ?

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La première raison, c’est sa douceur. Contrairement au hackamore, qui peut avoir un effet de levier assez fort, ou au licol éthologique, dont les nœuds peuvent créer des points de pression précis, le sidepull agit simplement par pression latérale sur le chanfrein et les côtés de la tête du cheval. Pas de zones douloureuses ciblées, pas d’action mécanique sévère : la communication se fait de manière claire mais sans contrainte excessive.

La deuxième, c’est sa simplicité. Le sidepull s’utilise exactement comme un filet classique : on attache ses rênes aux anneaux, et on garde les mêmes sensations dans les mains. Pas besoin d’apprendre une nouvelle technique, comme avec le hackamore qui demande plus de doigté, ou le bitless bridle qui répartit la pression de façon parfois difficile à lire. Pour une transition en douceur, surtout quand on débute dans le sans mors, c’est l’option la plus intuitive.

Enfin, la troisième raison, c’est sa polyvalence. Je peux l’utiliser aussi bien en carrière qu’en balade, pour du travail sur le plat ou simplement pour profiter d’une sortie en extérieur. Certes, d’autres systèmes sans mors peuvent aussi être utilisés dans ces contextes, mais ce que j’apprécie dans le sidepull, c’est son équilibre : il reste doux tout en permettant une communication suffisamment précise pour la plupart des situations.

C’est pour toutes ces raisons que le sidepull s’est imposé comme l’alternative la plus adaptée pour nous deux : respectueux de ma jument, facile à prendre en main pour moi, et assez souple pour convenir à notre quotidien.

Conseils pratiques (choisir & ajuster son sidepull)

Si vous envisagez d’acquérir un sidepull, voici quelques conseils pour bien le choisir et surtout l’ajuster correctement, afin qu’il soit confortable pour votre cheval tout en restant précis.

  • La muserolle : je recommande toujours une muserolle plate et large, car elle répartit mieux la pression et évite les points douloureux. Ensuite, il faut bien veiller à sa position, elle ne doit être ni trop haute, ni trop basse : elle doit reposer environ deux doigts sous l’os zygomatique, pour ne pas appuyer sur l’extrémité fragile de l’os nasal. Quant au serrage, il ne doit jamais être excessif : un ajustement trop fort peut bloquer la bouche, générer du stress, augmenter la fréquence cardiaque et la température oculaire, et limiter certains comportements naturels, parfois au détriment du bien-être du cheval1 ⚠️
  • Le frontal : il doit être à la bonne taille, sinon il tire sur la têtière et comprime derrière les oreilles.
  • La têtière : je la préfère matelassée, avec un dégagement suffisant pour les oreilles, et je vérifie toujours qu’une main à plat peut passer entre la têtière et la nuque du cheval.
  • La sous-auge (ou sous-ganache) : même réglage que la muserolle, deux doigts d’espace pour maintenir le tout sans gêner.
  • Les matériaux : j’ai une préférence pour le cuir, agréable et élégant, mais qui demande un peu d’entretien. Le biothane est une excellente alternative pour l’extérieur : résistant à l’eau et à la boue, il se nettoie très facilement. Les sidepulls avec muserolle en corde existent aussi, mais je trouve que ça appuie trop localement et est moins confortable pour le cheval.
Les détails de mon side-pull, le modèle Micky de chez MD Equestrian, sont vraiment magnifiques.

Passer au sidepull a été pour moi une véritable révélation : ma jument est plus détendue, plus réceptive, et notre communication est devenue beaucoup plus fine. Ce que j’ai découvert, c’est qu’un simple changement de matériel, bien pensé et bien ajusté, peut transformer toute une relation cavalier-cheval. Si vous êtes tentés par l’expérience, n’hésitez pas à tester le sidepull avec votre cheval, en respectant son confort et en observant ses réactions. Vous serez souvent surpris de voir à quel point un ajustement simple peut transformer votre équitation et renforcer votre lien avec votre cheval.

  1. Fenner, K., Yoon, S., White, P., Starling, M., & McGreevy, P. (2016). The Effect of Noseband Tightening on Horses’ Behavior, Eye Temperature, and Cardiac Responses. PLoS ONE, 11(5), e0154179. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0154179 ↩︎

Sources

Anthony, D. W. (2010). The horse, the wheel, and language: how Bronze-Age riders from the Eurasian steppes shaped the modern world. In The Horse, the Wheel, and Language. Princeton University Press.

Budiansky, S. (1997). The nature of horses. Simon and Schuster.

Clutton‐Brock, J. (1992). The process of domestication. Mammal review, 22(2), 79-85.

Edwards, E. H. (2000). The New Encyclopedia of the Horse. DK Publishing (Dorling Kindersley).

Greenfield HJ, Shai I, Greenfield TL, Arnold ER, Brown A, Eliyahu-Behar A, et al. (2018) Earliest evidence for equid bit wear in the ancient Near East: The « ass » from Early Bronze Age Tell eṣ-Ṣâfi/Gath, Israel. PLoS One 13(5): e0196335. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0196335

Politz, G. (2008). History of Bits, Evolution of the Double Bridle. Dressage Today. https://equisearch.com/articles/double_bridle_071708/

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